Cyrille de Jérusalem, fêté le 18 mars, est un évêque du IVe siècle très important dans l’histoire du christianisme pour deux raisons au moins : il a défendu en son temps la foi « droite » (orthodoxie), maltraitée par l’hérésie arienne, et on l’a exilé à trois reprises sans qu’il cède à la menace et à la peur ; mais il a surtout écrit des catéchèses lumineuses sur la préparation des catéchumènes et la liturgie baptismale de la veillée pascale, que l’on a très heureusement conservées.
A côté de ce grand théologien, voici juste derrière, le 19 mars, la fête de Saint Joseph, le silencieux, l’obscur charpentier de Nazareth – l’homme qui a servi de père au Christ jour après jour sans laisser de trace : ni commentaire, ni monument, ni archives, ni tombe. L’époux de Marie ne parle jamais directement dans les Ecritures ; à peine apprend-on, par l’Evangile de Luc, que la Vierge fit remontrance en son nom à un Jésus de douze ans qui enseignait au Temple : « Pourquoi agir de la sorte envers nous ? Ton père et moi nous te cherchions, tout angoissés… ».
Cyrille, un savant, un docteur de l’Eglise universelle. Joseph, un inconnu, confronté au mystère de l’élection de sa fiancée ; un homme de foi, qui écoute la parole de l’ange, et qui la croit ; un homme de cœur qui assume avec dévouement la difficile paternité de Jésus. Pas d’âge, pas de visage, pas d’évocation pour une mort très discrète.
Voici donc rapprochés par les hasards du calendrier deux saints bien différents. Deux voies, deux destins : celui qui accepte l’inouï, et qui reste dans l’ombre ; celui qui, sur le devant de la scène, combat pour la foi menacée et laisse des enseignements mémorables.
Alors, oui, l’appel à la sainteté est bien pour tous, et prend chacun là où il se trouve, à sa mesure, et souvent au dépourvu. N’ayons pas peur, donc, malgré nos misères et notre pauvreté, d’oser y penser et, dans la grâce du baptême, d’en aborder humblement le chemin.
Simone Grava-Jouve